Dao dezi

Dao dezi est le titre d’un album sorti en 1994 où Denez Prigent et le groupe Deep Forest revisitent des gwerz et des chants bretons moins tragiques en y ajoutant de la musique électro et des influences world. Cet album m’a accompagné dans la préparation de mes différentes traversées. En particulier cette très belle interprétation de la gwerz Ty Eliz Isa. Merci à toi Denez qui a les pieds et le coeur bien enracinés dans le sol breton et le regard et l’esprit ouverts aux autres cultures.

Ce n’est pas toujours évident d’obtenir une réponse claire lorsque qu’on cherche l’équivalence en français d’une expression ou d’un mot d’une autre langue. C’est le cas pour Dao Dezi.
Pour ma part, après avoir consulté quelques bretonnants, j’ai retenu “Allons-y” que j’ai transformé en “Bourre dedans” ayant en tête l’image d’un bateau taillant bravement sa route dans la “plume”, pour reprendre une expression du monde d’avant.

J’ai découvert Dao Dezi en 1994. Cette expression ne m’a jamais quitté. J’en ai découvert une autre une dizaine d’années plus tard : “Stay hungry, stay foolish”. Elle émane de Steve Jobs, le fondateur d’Apple. Se prenant pour Dieu plutôt que pour Moïse, il a établi sa propre table de 10 commandements.

On peut penser, charité bien ordonnée commence par soi-même, qu’il les a suivis, ce qui semble lui avoir réussi. Stay hungry, stay foolish en est le dixième, que l’on peut traduire par Soyez affamé, soyez fou.

Affamé dans le sens curieux de tout, ne pas se laisser enfermé dans des certitudes, être à l’écoute, avoir envie.
Fou à prendre dans le sens de Dao Dezi : on y va, on verra bien après ce qui se passe. Je ne suis pas fan de l’astrologie, mais étant bélier ascendant bélier, je dois admettre que plus d’une fois j’ai foncé tête baissée dans une direction ou un projet sans avoir tout verrouillé, voire sans avoir rien verrouillé du tout, ce qui n’a pas manqué d’entraîner certains déboires et désillusions. mais également d’apporter des grandes joies et satisfactions. Qui ne risque rien, n’a rien, ce que Bertolt Brecht a dit autrement : “Celui qui combat n’est pas sûr de gagner, mais celui que ne combat pas à déjà perdu”. C’est exactement ça.
Stay hungry, stay foolish me semble correspondre à mon parcours de vie. Ne pas se résigner, ne pas attendre la mort, mais profiter de ce court moment qu’est la vie pour avancer d’une manière ou d’une autre. Chacun est fait comme il est, chacun prend feu comme il peut dit la chanson de Pierre Bachelet et Florence Arthaud. Il y a mille manières de prendre feu. A chacun son chemin.

“Dao dezi,” “Stay hungry, stay foolish”. Mon approche de la vie tient en ces deux expressions que, sans en avoir l’intention,  Manu Lann Huel a synthétisées dans la chanson Enez Molenez où il évoque ma traversée de l’Atlantique à la rame de 1995 que j’avais réalisée pour les Sauveteurs en mer : 

Lui qui rame la vie
Contre le vent du dehors
Lui qui rame la vie
contre la mort du dedans
contre le silence noir
qui craque sur ses amarres
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Le silence noir qui craque sur ses amarres…